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Abolir le temps
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30 septembre 2019

Redécouvrir le monde ?

Récemment, j'ai vu dans les couloirs du métro la dernière campagne de pub pour un casque Bose. En substance, celle-ci disait que grâce à la technologie de ce casque sans fil, et à ses commandes sur les écouteurs, on pouvait "redécouvrir le monde". Les autres utilisateurs de casques avaient les yeux rivés sur leurs téléphones, alors que la jeune fille l'utilisant semblait rêvasser en souriant, les yeux en l'air... Etre dans sa bulle musicale tout en étant dans le monde : voilà ce que vend la marque.

casque Bose 700

Serions-nous parvenus à une époque étrange durant laquelle on doit signaler que le monde alentour a disparu et qu'il faut à nouveau le regarder ? A-t-on perdu le monde ? Ne le voit-on plus ?

J'ai toujours aimé regarder par la fenêtre les paysages qui défilent, en train, en bus, en voiture. J'ai toujours aimé observer les gens qui m'entourent dans les transports, car la galerie de portraits est très souvent surprenante. C'est être oisif et pourtant actif, tout comme Montaigne pouvait le dire : l'oisiveté est mère de fertilité pour l'esprit.

Prendre le temps de regarder, de ralentir, semble incongru dans cette époque où tout va vite, où l'on zappe, où l'on entend des enfants dire qu'ils s'ennuient au bout de cinq minutes sur une même activité, où les enseignants doivent varier les activités tels des animateurs de colonies de vacances pour retenir l'attention des élèves...

A la fin des années 90, début 2000, on parlait beaucoup d'une vague d'auteurs et d'artistes qui incarnaient le plaisir de la lenteur, le plaisir des petits riens : Philippe Delerm et son fils, Christian Bobin, entre autres... On les nommait les "minimalistes", si je ne me trompe pas. On pourrait y ajouter des poètes asiatiques tournés vers l'haïku, aussi. Atteindre la simplicité et vanter la lenteur (et non la mollesse, c'est très différent) : ce serait là la position paradoxale à atteindre à notre époque, semble-t-il.

Et celui qui prend le temps (quelle jolie expression ! Comme si le temps avait un aspect palpable, un peu comme on prend la main de quelqu'un) passe bien souvent pour un égoÏste ou un farfelu. Blaise Pascal mentionnait déjà que nous avons bien du mal à rester assis, seul, dans le noir. J'ose dire ici que prendre le temps, ralentir le tempo, le plus souvent seule, est l'un de mes plus grands plaisirs.

 

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