Déconnectons

Suite à mon dernier article sur un casque Bose incitant à regarder à nouveau le monde, j'ai vu dans mon quartier et dans le métro des affiches Orange montrant à quel point nous passons par le téléphone portable quoi que nous fassions. L'idée de cette campagne de publicité ("Bien vivre le digital") est de dire que le fournisseur Orange vous aide à déconnecter : comment bien utiliser son téléphone ? En le mettant en mode avion et en allant au cinéma. Ou encore : "Bravo, vous avez quitté des yeux votre téléphone" pour lire cette affiche.

Capture d'écran sur le site Orange

Grands dieux, reviendrons-nous au "c'était mieux avant" quand on n'avait pas de portable ? L'idée de cette campagne est fort astucieuse et paradoxale : pour ne pas trop être dépendant à votre téléphone, venez donc chez nous, fournisseur de téléphonie. Mais cela en dit long, malgré tout, sur la frénésie des dernières années, surtout sur les générations nées avec l'usage du portable comme un geste banal.

Je le constate sur mes élèves : ils ne lèvent pas le nez de leurs écrans, et s'y agrippent dès que possible. Pour les bousculer gentiment, je leur demande de lâcher leur doudou moderne. Mais comment leur démontrer que le temps passé sur les écrans est du temps volé à d'autres activités, parfois plus intéressantes ? Comment ne pas passer pour un dinosaure rétrograde et conservateur ?

Dernièrement, je leur parlais de la facilité déconcertante à trouver les références d'un morceau entendu à la radio ou dans la rue grâce à Shazam. Je leur expliquais que c'est magique pour moi, autant que pour leurs parents. Ils ont essayé d'imaginer comment nous faisions "avant". Certains ne pouvaient entendre qu'il n'y avait pas internet quand j'étais adolescente : "Ben vous alliez sur Youtube !"

La rapidité de l'information donnée par internet en fait oublier les efforts et la satisfaction que nous avions à la trouver "avant". Il y avait aussi le plaisir de la frustration (si, si !), de l'attente, de l'espoir... Je suis de ces générations qui n'avaient d'autre choix que d'être patientes et parfois frustrées. En ai-je mieux vécu ? Plus appris ? Je l'ignore. L'idéal est sans doute entre les deux pratiques, celle de l'avant et celle de l'après téléphone mobile, et ce qui est surprenant aujourd'hui, c'est que de grandes marques tentent de nous le faire comprendre.