Quarante-quatre
Aujourd'hui, j'ai quarante-quatre ans. En soi, ce n'est pas un âge particulier : il ne tombe pas rond, et ne mérite pas d'égard plus qu'un autre. Pourtant, il a un poids véritable pour moi : c'est l'âge que mon père n'a jamais eu. Il est mort huit jours avant ses quarante-quatre ans. Je venais d'en avoir dix-huit.
Quelle étrange sensation pour moi de me dire que :
1) c'est comme si l'on m'annonçait que j'allais mourir, maintenant.
2) mon père est mort à l'âge que j'ai. C'est à la fois très jeune et en même temps je me demande ce que j'ai accompli, ce que je vais accomplir. Mon bilan me paraît maigre, pour être franche.
3) je vais atteindre un seuil que mon père n'a jamais connu.
J'ai adoré ma trentaine. Mais honnêtement, je n'aime pas ma quarantaine. Elle est associée à des échecs répétés et divers, des douleurs dorsales, une vue qui a baissé, une fatigue quasi chronique...
Peut-être que mon horloge retentira, vaillante et heureuse, à un moment donné. Pour l'instant, je vais me contenter de boire un verre à la mémoire de mon père.